Adoption et compétition technologique

Beaucoup d’innovations ne dépassent pas le stade du projet, beaucoup d’inventions ne rencontrent jamais leur public. D’autres, après un début de notoriété, disparaissent du fait du succès d’autres innovations concurrentes. Une innovation ne se développe pas de manière isolée ; certaines périodes au contraire voient se multiplier les solutions nouvelles à des problèmes donnés. Ce chapitre abordera la compétition entre innovations, entre innovations techniques en particulier.

2. Technologie et marché

2.3. Un monopole temporaire

La compétition technologique conduit à la domination d’une technologie, les adopteurs faisant le choix de la compatibilité. S'en suivent ensuite des stratégies qui conduiront les firmes à verrouiller le marché. La stratégie de verrouillage au sein d’une entreprise consiste à se protéger du risque des nouveaux entrants et développer sa stratégie afin d’obtenir un avantage concurrentiel.

Première conséquence : le verrouillage de marché.

Un grand apport des modèles de compétition technologique est de montrer qu’au-delà des monopoles temporaires (ceux nécessaires à la dynamique du capitalisme pour Schumpeter), la compétition peut conduire au verrouillage.
Dans une situation de verrouillage, le monopole n’est pas simplement temporaire. Il se perpétue dans le temps. C’est le cas de Microsoft avec son système d’exploitation.

La situation est-elle réversible ?

Tout dépend des sources de rendements croissants d’adoption ayant entraîné la sélection. Si ne sont concernées que les externalités de réseau, la situation est réversible. La conversion peut être contrariée, ou ralentie, par des excès d’inertie. Mais dans ce cas, l’avantage de la technologie dominante n’est lié qu’à un problème de masse critique. Les excès d’inertie peuvent conduire au maintien de cette situation, mais ils ne constituent pas une source d’irréversibilité. Le verrouillage apparaît largement irréversible lorsque les perfectionnements effectués au cours de l’adoption portent sur l’apprentissage, les économies d’échelle et l’interdépendance des éléments techniques.

Que deviennent les « perdants » ?

Jean-Michel Dalle (professeur, spécialiste de l'économie et du management de l'innovation) relativise quelque peu les résultats par l’existence de niches technologiques comme c’est le cas pour Betamax en Colombie ou chez les professionnels de l’image (globalement évincé par VHS). De même, le maintien de Mac face au PC, doit beaucoup à la niche des graphistes. Ces niches peuvent être pérennes, voire, à terme, conduire à un retournement de la situation (les MAC gagnent chaque jour des parts de marché face au PC, non ?)
Les RCA sont naturellement incorporées aux technologies de réseau. Elles sont aussi de plus en plus exploitées par les firmes leaders qui cherchent à maintenir le verrouillage dont elles bénéficient.
Les réseaux sociaux dépendent principalement des externalités de réseau. La situation semble alors réversible, même si cela peut prendre du temps. Les acteurs économiques mettent alors en œuvre des stratégies pour générer l’irréversibilité. En jouant notamment sur l’interdépendance des éléments techniques.