Géographie et politiques de l'innovation

Site: Plateforme pédagogique de l'Université de Bordeaux (Sciences & Techno.)
Cours: Innovation : théories et pratiques
Livre: Géographie et politiques de l'innovation
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Date: dimanche 6 octobre 2024, 18:21

Description

Les politiques publiques comme les institutions posent la question des territoires et espaces sur lesquels les activités d’innovation se déroulent. Nous étudierons plus généralement comment et avec quels outils les politiques publiques peuvent encourager l’innovation face aux défaillances de marché et au besoin d’accompagner le fonctionnement de ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler les systèmes ou même les écosystèmes d’innovation.

1. Géographie de l'innovation

Les nouvelles technologies, et plus largement les nouvelles idées, naissent dans des lieux spécifiques. Nous avons tous en tête l’image de la Silicon Valley – berceau de l’industrie informatique – ou de Paris, New York, ou Milan par exemple pour la mode

En réalité, il ne s’agit pas d’un phénomène isolé car, quelle que ce soit l’échelle géographique considérée, on constate que certains lieux disposent d’une richesse, d’un effort de recherche et développement ou de dépôts de brevets largement supérieurs à leur poids en termes de population.

1.1. Agglomération des activités d'innovation

Ces phénomènes d’agglomération s’expliquent par des mécanismes économiques : l’innovation, comme les activités économiques en général, a une géographie bien particulière.


1.2. Les justifications de l'agglomération

L’approche de Marshall a été renouvelée à partir des années 1970 avec la notion de « district marshallien » à laquelle ont succédé les milieux innovateurs dans les années 1980, les systèmes régionaux d’innovation (SRI) dans les années 1990 ou les clusters qui sont aujourd’hui entrés dans le langage courant.


1.3. La redécouverte des périphéries

Nous avons parlé de croyance à propos du schéma centre-périphérie et ceci n’est pas innocent : un certain nombre de constats et de recherches remettent en cause la portée générale de ce modèle.


2. Les politiques de l'innovation

L’innovation est un processus économique particulier qui justifie une intervention publique bien plus forte que dans d’autres domaines de la vie économique. Les théories de la croissance endogène par exemple insiste sur le rôle essentiel de l’innovation dans la croissance.

2.1. L'innovation comme terrain privilégié de l'action publique

L’action publique en faveur de l’innovation n’est pas nouvelle. Les besoins militaires ont longtemps justifié un financement public garantissant le secret des innovations. Mais l’intervention ne s’y limitait pas : durant les révolutions industrielles, dès le XIXème siècle, les États cherchaient à accéder aux secrets de l’industrie en tentant d’attirer des ingénieurs anglais au cœur de ces premières révolutions.


2.2. Les défaillances du marché

D’une façon générale, le principal problème lié à l’innovation dans l’approche économique standard tient à l’écart entre le rendement social et le rendement privé de l’innovation.


2.3. Organiser les interactions dans les systèmes d'innovation

Il est possible d’adopter une vision plus large des institutions dont le rôle ne se limite pas à la correction des défaillances de marché. C’est ce que propose l’approche par les systèmes d’innovation.
Sans se limiter aux mécanismes de marché, ces approches prennent en compte les acteurs de l’innovation et leurs interactions car l’innovation dépend de la forme et de la fréquence des interactions et s’inscrit dans une histoire.


2.4. La politique de l'innovation en France

La politique de l’innovation en France a beaucoup évolué depuis les Trente glorieuses. Pour la période récente, la commission nationale d’évaluation des politiques d’innovation souligne des évolutions fortes depuis 2000.

La politique de l’innovation en France a beaucoup évolué depuis les Trente glorieuses. Pour la période récente, la commission nationale d’évaluation des politiques d’innovation souligne des évolutions fortes depuis 2000. Dans son rapport du début de l’année 2016, elle indique que les dépenses publiques destinées à soutenir l’innovation et la recherche dans les entreprises privées ont plus que doublé entre 2000 et 2015.
Ces dépenses, évaluées à environ 3,5 mds d’Euros en 2000, seraient aujourd’hui de l’ordre de 10 mds d’Euros (dont 6 milliards pour le seul crédit impôt recherche, le fameux CIR).


Moyens de l'état soutien innovation


Rapprochée des quelques 30 mds d’Euros de dépenses de recherche et développement effectuées par les entreprises en France, on mesure ainsi combien cette intervention est massive.
La France dispose aussi d’un système de recherche publique très développé par rapport à d’autres pays. Le secteur public en France exécute pour environ 18 mds d’Euros de recherche par an.

Au global, on voit que l’effort de recherche en France repose pour moitié environ sur la dépense publique.


financement et exécution recherche

La commission nationale d’évaluation des politiques de l’innovation a proposé de regrouper l’intervention publique en faveur de l’innovation autour de 5 grands axes :

  • Stimuler la R&D privée
  • Accroître les retombées de la recherche publique
  • Développer les coopérations entre acteurs
  • Promouvoir l’entrepreneuriat innovant
  • Soutenir le développement des entreprises innovantes

Nous allons voir que ces objectifs sont très cohérents avec les justifications théoriques dont nous avons parlé précédemment, et que ces objectifs sont servis par des outils d’intervention dédiés.

Famille objectifs


Le premier objectif est celui d’augmenter les capacités de recherche privée. Répondant à la première des défaillances de marché en matière d’innovation, cet objectif vise plus concrètement à stimuler une démarche d’innovation plus que d’imitation de la part des entreprises. De nombreux outils ont été mis en place dans ce sens comme les aides à l’innovation, le crédit impôt recherche (le système français étant le plus généreux au monde) ou le soutien à des projets sur des thématiques jugées prioritaires.

Le second objectif vise à rendre plus efficace la recherche publique en partant du constat qu’elle est souvent trop cloisonnée par rapport à la recherche privée. Pour répondre aux manques d’interactions dans le systéme d’innovation français de nombreux mécanismes ont été mis en place pour favoriser la diffusion de l’innovation issue de la recherche publique (les Sociétés d’accélération du transfert de technologie – SATT) ou la coopération entre le secteur public et le secteur privé (Instituts, chaires et autres laboratoires communs).

Le troisième objectif est plus centré sur les problèmes de collaboration entre les acteurs du système, en particulier pour les PME qui n’ont pas les mêmes contraintes que les laboratoires publics ou les grandes entreprises. Les actions en direction des systèmes locaux sont ici privilégiées : pôles de compétitivités, clusters et grappes d’entreprises ou plateformes mutualisées visent à favoriser les collaborations entre les acteurs du système.

Le quatrième objectif concerne la création d’entreprises innovantes et vise à favoriser la prise de risque qui est limitée dans un système de marché classique. Cette défaillance serait corrigée par la mise en place de mécanismes d’aides spécifiques à la création d’entreprise ainsi que d’avantages fiscaux liés au statut d’entreprise innovante. Des mécanismes d’accompagnement sont aussi prévus pour les créateurs d’entreprise selon leur origine (sans emploi, activité salarié ou chercheur par exemple).

Le dernier objectif recensé répond aux défaillances de marché en matière de financement de l’innovation pouvant freiner le développement des entreprises. Il existe une grande variété de dispositifs favorisant ce financement (par le capital-risque, les aides directes, les crédits d’impôt) ou permettant d’accompagner ces entreprises (centres de ressources technologiques permettant d’accéder à des ressources humaines ou matérielles complémentaires).

Quelle efficacité de la politique de soutien à l'innovation : l'exemple de la France

L’État français a développé un arsenal important de mesures visant à soutenir l’innovation et son système national en général.

L’action de l’État ne se limite pas à ces mesures directes en faveur de l’innovation, il agit aussi plus généralement sur son environnement (par sa politique de formation, sa politique en matière de concurrence, de flexibilité du marché du travail etc.). Il s’agit aussi de créer un contexte favorable à l’innovation.

Pour autant, la question de l’efficacité des politiques d’innovation est souvent posée, en particulier au vu du montant consacré au Crédit impôt recherche.

Les débats ne sont pas tranchés à ce niveau (voir à ce propos le rapport de la CNEPI ou l’article de D. Encaoua).

Rappelons cependant que si tous ces outils ont certes des avantages indéniables ils sont souvent critiqués pour leur coût élevé pour les finances publiques, leur rendement incertain, la difficulté à sélectionner les bons projets, les risques d'effets d'aubaine ou de maintien d'entreprises inefficaces sur le marché.
Enfin, rappelons que le financement de la recherche publique en amont est susceptible d'engendrer de nombreuses retombées à long voire très long terme sur l'innovation des entreprises privées.

Au total, c’est l’enjeu porté par les effets de l’innovation face aux difficultés à mettre en place un écosystème d’innovation efficace qui justifie l’intervention publique en la matière, même si les bénéfices de cette action restent incertains.

2.5. Paroles d'expert : innover pour s'adapter ou l'inverse ?

Les nouvelles technologies ont remis en cause le fonctionnement de nombreux domaines en reconsidérant certains modèles économiques et systèmes établis. Aujourd'hui, les nouveaux défis sociétaux, institutionnels et environnementaux poussent tout autant les industriels à innover plus mais surtout mieux.



3. Des acteurs au service de l'accompagnement de l'innovation

Les acteurs publics, outre le fait qu'ils peuvent vous aider dans votre financement, sont susceptibles d'assurer un suivi de votre démarche d'innovation.

Dans cette partie, les acteurs publics aquitains de l'innovation vous expliquent leurs rôles et missions. Dans toutes les régions françaises, vous retrouverez le même type d'acteurs.


3.1. L'innovation : une priorité territoriale

Un exemple d'accompagnement et d'explications d'axes stratégiques avec le Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine.


Conseil Régional (1)



Conseil régional (2)


3.2. Le rapprochement du monde académique et du monde de l'entreprise

Afin d'accélérer et de développer l'innovation, les collaborations et partenariats avec les laboratoires de recherche sont souvent indispensables. Il existe tout un réseau, le réseau des SATT (Sociétés d'accélération du transfert des technologies) en région qui détecte et évalue les inventions provenant des laboratoires de recherche et qui les accompagne jusqu’au transfert vers une entreprise. Elles œuvrent aussi au rapprochement entre monde académique et monde de l'entreprise en étant le trait d'union entre ces deux univers. Il existe aussi des dispositifs afin de favoriser l'entrepreneuriat chez les étudiants.


SATT





Entreprenariat Campus Aquitaine







3.3. Un exemple de structure d'accompagnement

De la région, passons maintenant à une échelle plus petite, celui de l'agglomération. De l'accompagnement au financement, qui peuvent être vos interlocuteurs ?